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Opinion: L'Europe - les chemins vers nulle part!

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_Portrait_of_Henri_Malosse_0034Par Henri Malosse, président du Comité économique et social européen (CESE) (photo)

Sur 25 May 2014, les électeurs européens devront choisir des députés parmi des candidats dont ils n'ont probablement jamais entendu parler, qui siégeront dans un parlement dont les responsabilités et les pouvoirs leur sont mal connus.  

Les principaux thèmes de la campagne prennent progressivement forme dans chaque pays de l’UE. Et, comme d'habitude, les débats seront dominés par des questions et des jeux politiques nationaux, chaque partie développant sa propre rhétorique et ajoutant une dimension européenne aux apparences. Dans ce jeu d'apparences, les citoyens européens sont souvent confrontés à trois choix, à savoir trois types d'acteurs politiques: ceux qui ont fini avec l'Europe; ceux qui préconisent le grand saut; et ceux qui tentent de conserver le statu quo. À notre avis, aucune de ces options ne nous mènerait nulle part et nous devons suggérer une autre voie pour l'Europe.

1. L'euroscepticisme  
Premièrement, nous avons les eurosceptiques - de l'extrême gauche à l'extrême droite, et une gamme intermédiaire de mouvements nationalistes et souverainistes - qui veulent une Europe purement intergouvernementale. Ils fondent leur argumentation sur un modèle de société dépassé, à savoir, une nation, une langue, un État. Les plus radicaux d'entre eux n'hésitent pas à proposer la suppression des institutions européennes, la restauration des frontières, la sortie de la zone euro, etc. Pourtant, l'Europe a déjà tenté cette voie, et nous savons où elle s'est terminée. L'Allemagne, puissance majeure du moment, pourrait bien faire équipe avec certains pays d'Europe centrale et orientale, les Pays-Bas et peut-être les pays nordiques, laissant d'autres pays européens à la recherche d'une coalition alternative. N'avons-nous pas vu quelque chose comme ça avant? Hormis la menace de nouveaux conflits, la vraie crainte est que notre continent puisse sombrer irrémédiablement dans le déclin international.

2. Fédéralisme européen
À l'autre extrémité du spectre, nous avons les euro-enthousiastes, comme le groupe Spinelli, qui prônent des progrès rapides vers une Europe fédérale à l'image des États-Unis d'Europe. Cette idée, qui existe depuis des décennies, est bien plus déconnectée que jamais de la réalité de la base. Compte tenu de l'impopularité des institutions de l'UE auprès des Européens (selon la dernière enquête d'Eurostat, plus de 60% des citoyens de l'UE ne leur font pas ou plus confiance), comment leur demander de soutenir un projet impliquant un transfert de souveraineté politique à Bruxelles, qu'ils assimilent aux mesures d'austérité et à la technocratie qui leur rendent la vie si difficile?

3. Le status quo
La grande majorité des partis traditionnels essaient de s'accrocher au modèle hybride d'une Europe mi-intergouvernementale, mi-Union. Ces dernières années, ce modèle s'est caractérisé par une série de réunions de crise, des déclarations fatiguées et des propositions bricolées insatisfaisantes de la part des institutions. Qui peut sérieusement croire qu'un plan de 6 milliards d'euros (soit 300 euros par demandeur d'emploi) est susceptible de faire une brèche significative dans le chômage en Europe? Une Europe où les présidents de la Commission et du Conseil se bousculent encore pour leur place parmi les chefs d'État, est une Europe où, une cinquantaine d'années plus tard, la question de Kissinger - "Qui appeler si je veux appeler l'Europe?" - est toujours d'actualité. Le pire choix serait en fait de ne rien faire et de laisser le projet européen dériver progressivement jusqu'à devenir une source de crise perpétuelle.

Le quatrième chemin? 
Trois chemins, trois impasses! Il n’est pas surprenant que la majorité des Européens envisagent de dépenser 25 May 2014 pour se promener dans le pays, pêcher ou manifester contre une Europe qui les a oubliés.

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Mais pourrait-il y avoir une autre voie, une voie plus pragmatique? D'autres ont réussi avant nous - comme Jean Monnet, qui a mis le projet européen sur les rails après la dévastation de la Seconde Guerre mondiale.

L’Europe a dérapé, surtout depuis la crise, avec des modèles économiques et sociaux de plus en plus divergents, ou des modèles clairs et simples. Avec des salaires minimaux variant de 1 à 12 dans l'UE, les écarts de développement continuent de se creuser et les directives de Bruxelles concernant la taille des concombres ou la qualité des dispositifs de chasse d'eau ne feront rien pour y remédier.

La priorité devrait être de rétablir la confiance du public et la solidarité intra-européenne et de revenir sur la voie de la convergence. Pour cette raison, nous devons établir des outils appropriés et un calendrier pour leur mise en œuvre, notamment dans des domaines tels que le budget, la fiscalité et la protection sociale. Un institut budgétaire européen permettrait de fixer des objectifs prioritaires fondés sur les gains de compétitivité attendus d'une convergence et d'une solidarité accrues. La réindustrialisation de l’Europe serait une entreprise majeure qui la ramènerait sur la voie de la croissance et de l’emploi, comme cela s’est passé en Allemagne à l’époque de Schröder. En encourageant les entreprises nationales à travailler ensemble, nous faciliterions l’émergence de leaders européens compétitifs sur le marché international, comme Airbus, qui reste un exemple rare d’une véritable réussite européenne.

La prochaine étape consisterait à fixer un calendrier de convergence fiscale et sociale similaire à celui du serpent monétaire précédant l'établissement de l'euro. Un consensus pourrait alors être atteint sur plusieurs principes, tels que le besoin crucial de dynamiser l'industrie et le besoin vital de simplification. La troisième étape serait pour l'UE d'adopter un budget digne de ce nom - il représente aujourd'hui moins de 1% du PIB - lui permettant ainsi de devenir un acteur régional ayant la capacité d'influencer les décisions internationales.

Cette voie vers ce que j'appellerais une Europe solide et solidaire ne peut se faire sans l'implication permanente des Européens - parlements nationaux, Parlement européen, initiatives citoyennes et société civile. Jean Monnet a eu raison de créer un comité des partenaires économiques et sociaux au sein de la CECA en 1951 et, par la suite, le Comité économique et social en 1958. Face au refus des États membres de soutenir l'UE à travers ces changements nécessaires, l'UE devra se tourner vers les citoyens européens. Et pour ce faire, l'Europe doit les convaincre qu'ils sont au centre de ses préoccupations.

C'est pourquoi, le moment venu, une convention européenne devrait être lancée, sur le modèle du traité constitutionnel, mais cette fois ce ne sera pas pour se mettre d'accord sur la destination mais sur le chemin lui-même.

Comme Bouddha l'a dit, le bonheur est un voyage et non une destination. Ceci est également vrai pour l'Europe et les Européens.

Henri Malosse

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EU Reporter publie des articles provenant de diverses sources extérieures qui expriment un large éventail de points de vue. Les positions prises dans ces articles ne sont pas nécessairement celles d'EU Reporter.

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