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L'hydroélectricité : la rente qui bâtit les empires

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Renouvelable et pilotable, l'hydroélectricité a une valeur qui dépasse sa simple consommation en kilowattheures. Correctement encadrée par des contrats à long terme, elle devient un levier financier qui propulse les entreprises des barrages vers les réseaux, le cloud et l'IA – au risque de concentrer les infrastructures d'intérêt public entre les mains de conglomérats privés suffisamment puissants pour influencer la réglementation.

Dans l'imaginaire collectif, un barrage est avant tout un outil de production d'électricité – une idée aussi ancienne que les moulins à eau. L'hydroélectricité jouit d'une réputation favorable, notamment parce qu'elle n'a pas connu l'équivalent symbolique d'un « Tchernobyl » pour le nucléaire. Pourtant, si les capitaux privés continuent d'affluer, ce n'est pas uniquement par souci d'écologie. Sécurisé par des contrats d'achat d'électricité à long terme, un barrage peut se transformer en un tremplin financier dont les implications dépassent largement le secteur de l'énergie, permettant aux groupes d'investir dans les télécommunications, les centres de données, l'intelligence artificielle, voire les métaux stratégiques.

Le mécanisme est simple. On commence par des contrats d'achat d'électricité (CAE) de 20 à 30 ans générant des revenus comparables à ceux des obligations ; on y ajoute de faibles coûts d'exploitation et des actifs à amortissement lent ; enfin, une visibilité des flux de trésorerie qui réduit le coût du capital. De là découle l'effet de levier : les entreprises empruntent à faible coût en s'appuyant sur des recettes d'électricité prévisibles pour investir dans des secteurs d'activité connexes plus rentables – antennes-relais, centres de données, satellites, plateformes logistiques. L'énergie finance l'expansion ; l'infrastructure numérique capte la demande ; et l'ensemble du système acquiert un poids politique considérable à mesure que ses services deviennent « essentiels ».

Cette logique est évidente dans le secteur des grandes entreprises technologiques. En 2025, Google a conclu un accord d'environ 3 milliards de dollars avec Brookfield Renewable, basé sur deux contrats d'achat d'électricité (CAE) de 20 ans, afin de mobiliser de l'énergie hydroélectrique « ferme » pour ses centres de données américains : jusqu'à 670 MW immédiatement et, à terme, un potentiel de 3 GW. mises à niveau et extensions

L'énergie hydroélectrique n'est pas ici une fin en soi ; c'est une base modulable qui garantit le développement à grande échelle de l'IA et du cloud.

Une logique similaire apparaît dans ThailandBien que cette stratégie repose sur un ancrage régional, Gulf Energy Development, dirigée par le milliardaire Sarath Ratanavadi, a, selon Intelligence Online, lié ses revenus hydroélectriques à long terme – provenant principalement des barrages laotiens et vendus sur le marché thaïlandais – à une expansion dans les télécommunications et les données : un partenariat avec Intouch (maison mère d’AIS) approuvé en mars 2025 et une coentreprise avec Singtel et AIS pour la construction de centres de données près de Bangkok. Une fois encore, l’énergie issue des barrages n’est pas une fin en soi ; elle constitue plutôt la garantie discrète d’une expansion dans l’économie numérique.

Ailleurs, cette même dynamique sous-tend depuis longtemps les stratégies nationales. L'Islande a misé sur l'hydroélectricité pour attirer des fonderies d'aluminium à faible émission de carbone et, plus tard, des centres de données refroidis naturellement ; l'État conserve un contrôle ferme, mais l'hydroélectricité demeure un levier de diversification qui va bien au-delà de la simple production d'électricité. production.

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Tout cela soulève une question politique cruciale. Les barrages peuvent accélérer la décarbonation, réduire les risques liés aux investissements à forte intensité de capital et stabiliser les réseaux électriques ; ils peuvent aussi concentrer les infrastructures d’intérêt public – énergie, réseaux, cloud – entre les mains de conglomérats privés capables d’influencer les règles du jeu. Qui, dès lors, définit les priorités en matière d’allocation des capacités, d’accès non discriminatoire aux centres de données, ou de compromis lors de périodes de tensions hydrologiques et de flambées des prix ? La réponse déterminera si l’hydroélectricité demeure un bien commun au service d’une transition partagée, ou le socle financier d’architectures privées dont l’intégration verticale et horizontale rivalise avec celle de l’État et, à terme, érode la concurrence et la transparence démocratique.

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